YAELLE
Dossier médical
A 16 ans apparition d'infections urinaires à répétition : cystites, pyélonéphrites, bilan urinaire normal. De 20 à 22 ans plusieurs pyélonéphrites. A 38 ans cystites augmentent, proposition de méatoplastie (chirurgie qui vise à élargir le méat urinaire) non faite.
Sa vie
« Je suis l'aînée d'une fratrie de 2 enfants, j'ai un frère. Il y avait chez moi mes parents, mes grands-parents et mon arrière-grand-mère. Mon grand-père était alcoolique et violent. Mes parents travaillaient beaucoup étaient complètement absents. On m'a élevée en me disant que j'étais une contrariété. Mon père ne voulait pas d'enfant, il ne s'est jamais occupé de nous, il s'est senti piégé, il n'a donné ni amour ni tendresse. Ma mère voulait des enfants mais elle ne savait pas faire, elle non plus n'a donné ni amour, ni tendresse. Elle était la cinquième d'une fratrie de 6, elle s'est sentie la cinquième roue du carrosse, elle a été orpheline de père à 10 ans. Mes parents ont divorcé quand j'avais 16 ans, ma mère est partie et elle ne m'a pas demandé de la suivre, elle m'a abandonnée. Puis mon père m'a demandé de choisir : préfères-tu que je sois heureux avec ma maîtresse, ou bien que je fasse les choses comme il faut et que je porte la croix de la charge des enfants qui ne me convient pas ? J'ai envoyé chier mon père qui m'a culpabilisée en me traitant d'ingrate.
A 6 ans j'avais une copine qui inventait des scénarii avec un vieux monsieur qui la regardait, la tripotait, il fallait la tripoter et qu'elle me tripote, c'était un jeu malsain. Il y a eu franchissement de la ligne rouge.
J'ai eu mes premières règles à 13 ans, j'étais effondrée, j'ai passé 2 à 3 nuits à pleurer corps et âme. Je n'étais pas prévenue, je les ai vécues comme une malédiction, j'étais plate comme une limande, j'ai eu la croyance que je n'avais pas le droit de grandir, que je resterais dans un corps de petite fille.
J'ai eu mon premier rapport sexuel à 16 ans et avec lui ma première pyélonéphrite, la relation a duré 3 ans. A 20 ans mon père m'a mise dans les bras d'un homme riche pour un mariage arrangé. La relation a été nulle, une erreur, je n'ai pas été respectée. La sexualité a été difficile, laborieuse, parfois il se prenait le sexe, il disait : je bande, on baise. Il m'appelait Start Pilot, le nom d'un produit starter de démarrage de moteur. Il a essayé de me culpabiliser de cette sexualité pénible. J'ai fait 3 ou 4 pyélonéphrites pendant les 2 années de cette relation.
Je suis restée un an célibataire sans rapport, je n'ai fait aucune infection urinaire durant cette année. Puis à 22 ans, j'ai rencontré un homme qui m'a contrainte à l'épouser, il m'a dit soit tu acceptes soit je t'envoie 6 mois à l'hôpital (menace de violences). J'ai porté mon alliance comme un bracelet d'esclave, elle a pesé lourd à mon doigt. J'ai vécu pendant 8 ans avec lui, il m'a maltraitée, martyrisée, isolée. Tout ce qu'il a pu faire pour m'humilier, me rabaisser, il l'a fait, j'étais une esclave. Il y a eu viol conjugal, viol anal brutal. Parfois il me poussait hors du lit en disant, tu es trop grosse, tu me dégoûtes, je vais aller voir ailleurs. Ces paroles, même 8 ans après son décès tournent encore dans ma tête. Dans les scènes monstrueuses qui duraient toute la nuit, parfois je faisais une crise d'asthme d'angoisse qui l'arrêtait. Pendant cette période, j'ai fait des cystites après les rapports, j'ai fait aussi beaucoup d'angines qui m'empêchaient de parler, me rendaient complètement aphone, j'ai eu une amygdalectomie. Elles étaient très douloureuses ces angines, même pour ouvrir la bouche, mais cela ne l'empêchait pas de m'obliger à lui faire des fellations. Il m'a démolie, je me suis rabougrie, j'ai dû prendre des antidépresseurs. A 29 ans j'ai eu un accident de voiture qui m'a sauvée, j'étais dans la survie, la seule envie que j'avais était de mourir. Le médecin vu lors de l'accident l'a compris, il m'a proposé de voir un psychologue et je me suis autorisée à le faire. Il m'a sauvé la vie, il m'a ouvert une fenêtre pour que je puisse partir. J'avais mis tellement de couvercles sur la maltraitance que j'ai mis des années à m'en sortir. Un an plus tard, je me suis séparée de mon bourreau, il est mort quelques mois plus tard d'un accident de voiture en état d'ivresse. Sa vraie place est au cimetière. J'ai beaucoup de culpabilité de m'être laissée maltraiter pendant ces 7 années, en même temps le deuil est difficile à faire car je l'ai aimé et j'ai aimé sa fille que j'avais envisagé d'adopter. Ensuite je suis restée célibataire entre mes 30 et 37 ans, j'ai quand même eu quelques brèves rencontres qui ont toutes été suivies de cystites. Lors d'une de ces rencontres, je me suis fait agresser, il y a eu tentative de strangulation, morsure des seins. J'ai su par la police que cet homme avait déjà violé des femmes.
Je n'ai pas d'enfant. J'ai suivi le conseil de ma grand-mère qui me disait souvent : ne fais pas d'enfant, c'est une contrainte. Je n'en ai pas voulu à cause de la crainte terrible de reproduire le schéma familial, j'ai grandi sans amour ni tendresse avec un père absent dont j'ai dû faire le deuil de la relation et une mère qui est partie sans me proposer de m'emmener avec elle. Il y aussi la peur du rejet de l'enfant, la peur ne pas pouvoir surmonter les contraintes d'un enfant qui pleure, qui crie. »
Sa réflexion
« Depuis le temps que je dis qu'il y a autre chose ailleurs, qu'il y a un lien entre ma sexualité et les infections urinaires, sexualité qui dès l'enfance a été cachée, tabou, sale, perverse. Mes épisodes d'infections urinaires sont calés sur des moments tendus de ma vie. Depuis que j'ai 38 ans je suis avec un homme charmant qui, étrangement, a toujours vécu avec des compagnes précédemment maltraitées ou violées. Je fais des cystites incessantes, je suis sous antibiotiques un mois sur deux. Depuis que l'on vit ensemble, j'ai peur, j'ai peur qu'il me demande de l'épouser, une peur à 12/10. Je ne veux pas me remarier car j'ai peur d'être de nouveau enchaînée, que la bête ressorte (pleurs). Je suis peinée d'être privée de ce prolongement de l'amour qu'est la sexualité qui est limitée puisque chaque rapport s'accompagne d'une cystite. »