CHINA
Dossier médical
Infécondité inexpliquée entre 25 et 35 ans, échec de PMA, 10 IAC, 5 FIV. A 35 ans naissance d'une fille aprÚs grossesse spontanée.
Sa vie
« Je suis l'aĂźnĂ©e d'une fratrie de 3 enfants, mon frĂšre a 6 ans de moins que moi, et ma sĆur 11. Ma mĂšre disait que si elle avait eu le choix, nous n'aurions pas eu autant de diffĂ©rence, mais elle n'a jamais voulu en dire plus. Je pense qu'il y a eu un problĂšme, mais je ne le saurai jamais car tous les sujets liĂ©s Ă la sexualitĂ©, la reproduction, sont interdits, je pense Ă cause de son Ă©ducation catholique. Quand j'ai eu mes premiĂšres rĂšgles Ă 10 ans je n'Ă©tais pas prĂ©venue, j'ai pleurĂ© toutes les larmes de mon corps, mais je n'ai jamais abordĂ© ce sujet avec ma mĂšre. Mes parents Ă©taient absents, ils travaillaient 12 heures par jour, je n'ai aucun souvenir de jeux avec mes parents. Mon pĂšre ne s'est pas occupĂ© de nous, cela m'a beaucoup manquĂ©. Pendant mon enfance, je n'ai jamais manquĂ© de rien de matĂ©riel : les jouets, les vĂȘtements, les colonies, les vacances, les Ă©tudes, mais j'ai manquĂ© de ce qui est vital, la prĂ©sence de mes parents. Ils ont failli sur l'Ă©ducation, l'ouverture Ă la vie. Le rĂŽle des parents est d'expliquer, on m'a laissĂ© trop de points d'interrogation. Entre mes 12 et 18 ans, une ou deux fois par an, ils partaient une semaine en vacances avec les deux plus jeunes, mais comme moi je n'avais pas envie d'aller avec eux, je restais seule Ă la maison. Je pense que ce n'Ă©tait pas trĂšs raisonnable. C'est comme cela que j'ai eu mes premiers rapports sexuels Ă 12 ans avec un garçon de 17 ans.
A 16 ans j'ai eu un accident de scooter, je suis restée plusieurs heures dans le coma et j'ai eu une double fracture ouverte. Je suis restée un an sans marcher, puis un an avec une canne et depuis j'ai des séquelles à type de boiterie. Il y a eu un procÚs qui a duré 5 ans, un fardeau que j'ai traßné pas mal d'années. Cet accident a été un vrai traumatisme, il m'a beaucoup affectée. La voiture est devenue un problÚme pour moi, une voiture est un cercueil à roues, je ne peux pas conduire sur de longues distances, j'ai peur.
J'ai rencontrĂ© mon mari Ă 23 ans. Deux ans plus tard, nous avons souhaitĂ© un enfant qui n'est pas venu, et il y a eu ce long parcours de PMA pendant lequel les mĂ©decins disaient que je faisais partie des stĂ©rilitĂ©s inexpliquĂ©es. C'est trop difficile d'entendre qu'il n'y a rien mais qu'on n'arrive pas Ă nos fins. Puis la grossesse est venue spontanĂ©ment un an aprĂšs l'arrĂȘt des traitements. Mon mari voudrait un second enfant, mais moi j'ai peur qu'il y ait quelque chose, un problĂšme apportĂ© par la grossesse, que l'enfant ait un problĂšme, que la grossesse se passe mal, j'en ai suffisamment bavĂ©. »
Sa réflexion
« Moi je pense qu'il y a eu des facteurs psychologiques dans cette stĂ©rilitĂ©. La combinaison de mon enfance et l'angoisse de mort venue Ă la suite de mon accident qui a coupĂ© ma vie en deux avec l'avant et l'aprĂšs cet Ă©vĂšnement. Cette angoisse Ă©tait Ă 9 sur une Ă©chelle de 10, elle Ă©tait pour moi-mĂȘme et pour l'enfant potentiel, c'est elle qui m'a empĂȘchĂ©e d'ĂȘtre enceinte (pleurs). Pour la PMA, on est allĂ©s au bout du bout, et physiquement et psychologiquement, il fallait que cela s'arrĂȘte, sinon mon mari et moi nous nous serions sĂ©parĂ©s. J'ai lĂąchĂ© Ă 35 ans et de ce fait l'angoisse de mort pour l'enfant est tombĂ©e, et ma fille est nĂ©e spontanĂ©ment un an plus tard. Je pense qu'avant je n'Ă©tais pas prĂȘte. Cette angoisse bien qu'attĂ©nuĂ©e, est toujours lĂ et m'empĂȘche d'arrĂȘter la pilule pour un autre enfant, (pleurs) comme mon mari le souhaite. Mon mari m'a pourtant beaucoup aidĂ©e Ă diminuer cette angoisse, en rĂ©pĂ©tant sans cesse que seule la mort est grave, le reste on peut s'en arranger.
L'entretien m'a aidée à cerner les choses, à comprendre, tout cela est lié, c'était intéressant, trÚs formateur. On ne m'a posé aucune question sur ma vie pendant mon parcours de stérilité, ceci dit je ne sais pas si j'aurais eu le recul que j'ai aujourd'hui. »