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ANGÉLIE

Dossier médical

Angines à répétition entre 4 et 10 ans. A 15 ans thrombose sous clavière, choc lors de l'angiographie, une semaine de coma, 2 mois d'hospitalisation. Première cystite à 17 ans après le premier rapport sexuel puis cystites post-coïtales entre 17 et 18 ans qui deviennent incessantes entre 22 et 25 ans, deux pyélonéphrites. A 22 et 24 ans naissance d'un garçon, à 27 ans naissance d'une fille, à 29 ans IVG.

Sa vie

« Je suis la dernière d'une fratrie de trois filles. J'ai été livrée à moi-même pendant mon enfance, j'ai grandi seule, mes sœurs étaient plus âgées et mes parents étaient peu présents, travaillant beaucoup. Mon père partait toute la semaine, j'ai souffert du manque de présence, du manque affectif. Dans ma famille on n'avait pas le droit à l'expression, ma sœur aînée m'embêtait, me mettait la pression mais je ne pouvais pas en parler, je n'avais pas le droit de le dire. La retenue verbale s'exprimait par le corps : les angines à répétition qui se sont pratiquement arrêtées quand ma sœur a quitté la maison. Puis j'ai fait cette thrombose alors qu'il n'y avait jamais eu de problème de ce genre dans la famille. Quand je me suis réveillée de mon coma je ne voyais plus, j'ai retrouvé la vue plusieurs heures plus tard. On ne m'a rien expliqué de ce qui s'était passé.

A 17 ans, j'ai eu mon premier rapport qui s'est bien passé, mais j'ai commencé à faire des cystites post-coïtales pendant l'année qu'a duré la relation. Avec le recul, je pense que je n'étais pas du tout prête pour les rapports, c'était pour combler un manque. Je cherchais un retour affectif, la tendresse et l'amour, mais sûrement pas la sexualité et peut-être aussi un moyen de faire bouger mes parents. Mais ils n'ont pas bougé d'un pouce, j'ai eu le sentiment qu'ils se moquaient que j'aie des rapports ou pas, du moment qu'ils pouvaient compter sur moi pour bosser. Je devais être la fée du logis, je ne partais pas en vacances comme mes copines, il fallait travailler, faire le linge, le repassage.

Je suis partie de la maison à 19 ans par amour pour l'homme que j'ai épousé, mais aussi pour m'échapper, quitter le milieu familial. Nous avons eu notre premier fils et j'ai recommencé à faire des cystites à répétition entre sa naissance et celle de son frère ; depuis je n'en fais pratiquement plus. Je me suis séparée de mon mari à 42 ans à cause de l'absence de dialogue, de la charge trop lourde qui m'incombait, car c'est moi qui avais la responsabilité de la maison, des enfants, j'étais seule à tout gérer, mon mari était plus un enfant qu'un mari. »

Sa réflexion

« Pour moi la maladie vient du mental, du sacré mental, c'est tellement clair. Je pense que si on était sage et à l'écoute de soi on resterait en bonne santé. Cela fait un moment que j'ai pris conscience de tout cela, surtout après mes enfants, c'est intégré dans ma vie. Je pense que pour mes angines je voulais attirer l'attention sur moi, elles étaient une réponse à l'interdiction de s'exprimer, une façon d'embêter le monde. Ma thrombose est arrivée car on m'en demandait beaucoup trop, je devais travailler et travailler encore, je n'ai pas eu d'adolescence, il a fallu être adulte trop vite, trop précocement. Pour moi ma thrombose et le coma c'est une demande de pause, une demande pour qu'on s'occupe un peu de moi. En ce qui concerne mes cystites, celles de mes 17 ans lors de ma première relation, je pense que je n'étais pas prête du tout pour les rapports, pour les cystites post-coïtales qui sont apparues après la première naissance, c'était une échappatoire, un moyen d'échapper aux rapports dont je ne voulais pas, une façon d'arriver à mes fins. C'est très clair pour moi, j'étais comblée avec mon enfant, le bonheur total et suffisant, un amour fusionnel. C'était tellement important pour moi de ne pas reproduire le manque d'attention pour l'enfant que lui seul occupait mon attention, il n'y avait plus de place pour mon mari. J'aurais voulu pouvoir me donner le droit de le dire, mais je n'avais pas été élevée de cette façon. Les cystites ont été quelque chose que le corps a dit parce que j'ai eu du mal à le formuler par la parole. Les cystites ont disparu après la seconde naissance car je pense que j'ai pris du recul, j'ai été plus juste, plus équitable, j'ai laissé la place à mon mari. J'ai mis du temps à être bien dans mon corps de femme, j'ai pris le temps de découvrir la vie sexuelle, le rapport à l'autre. Pour moi la corrélation est nette entre les cystites et ce problème. Quand j'ai été bien dans mon corps de femme, je n'ai plus jamais fait de cystite.

C'est très intéressant cet entretien, de pouvoir formuler et d'avoir quelqu'un qui reçoive. Et pourtant, ce n'est pas toujours évident de le faire, j'ai répondu à mon médecin généraliste que tout allait bien quand il m'a posé quelques questions sur ma vie lors des cystites et je pense que quand j'étais enfant, je n'aurais pas pu répondre à ce genre de questions, j'aurais protégé mes parents. »

Tous les noms propres ont été anonymisés.