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ALIÉNOR

Dossier médical

Endométriose ovarienne diagnostiquée à 25 ans.

Sa vie

« Je suis la seconde d'une fratrie de 6 enfants, dont une demi-sœur que ma mère a eue d'un second mariage. Ma mère était enceinte de mon frère aîné lors de son premier mariage, moi j'ai appris récemment que j'ai été conçue en prison, je suis dégoûtée de cela, mon père y a passé deux ans pour trafic de drogue. J'ai appris il y a quelques semaines que mes parents étaient toxicos à la cocaïne. Ma mère a arrêté de se droguer après ma naissance. Ils se sont séparés car mon père trompait ma mère et ma mère dit qu'il ne s'occupait pas de nous. Il partait acheter des cigarettes et revenait 4 jours plus tard, sans doute à cause du trafic de drogue. Il n'était pas là quand je suis née, c'est ma grand-mère qui m'a déclarée sous le nom de ma mère. Et que j'ai sur ma carte d'identité. Je me suis rendu compte de cela quand à 13 ans j'ai voulu obtenir des papiers. Mon père m'a reconnue bien après ma naissance, mais à l'enregistrement, quand il a voulu me reconnaître, ils se sont trompés et j'ai toujours le nom de ma mère sur mes papiers. Mais ma mère ne supporte pas que je sois appelée par son nom, elle veut que je fasse partie de la fratrie. On dirait qu'elle a honte que je porte son nom, je ne comprends pas pourquoi, sauf si elle a quelque chose à cacher. Mon père un jour, sous l'influence de la drogue, m'a appelée au téléphone pour me dire qu'il n'était pas mon père, que les dates ne correspondaient pas, qu'il était en prison à ce moment-là. Je n'ai pas cherché plus. Mon père, je le kiffe, j'ai des bons souvenirs avec lui. Ma mère a essayé de créer un lien mère fille, mais elle n'a pas réussi, j'ai peur de ma mère, elle n'est jamais satisfaite. C'est un modèle pourri de mère, de femme, je fais tout pour ne pas lui ressembler. La féminité de ma mère, c'est zéro (rires). Pour moi elle a eu 5 rapports sexuels au cours de sa vie, pas plus. J'ai très mal vécu d'avoir autant de frères et sœurs. Moi je ne veux pas d'enfants, je ne veux pas être enceinte, je ne veux pas avoir quelque chose dans mon ventre et puis, c'est dégoûtant l'accouchement. Si j'avais un bébé je le donnerais, moi je n'aime pas les bébés. De plus j'aurais tellement peur de reproduire ce qu'a fait ma mère, pourtant elle aussi, elle avait tellement peur de reproduire ce qui s'était passé avec sa mère. Je ne sais pas si ma mère m'aime, cela ne se voit pas en tout cas. Pour moi, ma mère c'est la mère suprême, mais pas la 'maman', elle n'a jamais été une bonne maman, j'ai un mauvais exemple de mère. Je n'ai jamais eu de bisous, de contacts physiques de sa part, cela manque. Je lui en veux de beaucoup de choses à ma mère, toutes ses névroses elle les met sur moi. Mon anorexie c'est à cause d'elle, elle voulait absolument que je perde du poids, elle me disait sans arrêt que j'avais des grosses cuisses, des grosses fesses, même quand je pesais 59 kg pour 1,65m, alors j'ai maigri, maintenant je pèse 39 kg. Elle est grosse, elle n'a jamais réussi à faire un régime.

J'ai eu mes premières règles à 17 ans, je n'avais pas été préparée, ma mère ne m'en avait jamais parlé. J'ai eu peur, je n'en ai pas parlé à ma mère le premier mois. J'ai pensé que j'avais fait quelque chose de mal, quelque chose de grave, c'était comme si j'avais eu des rapports sexuels en dehors du mariage. Quand je l'ai dit à ma mère le deuxième mois, elle m'a juste dit : 'Va dans les toilettes, il y a des serviettes hygiéniques.' Comme elle ne s'est pas fâchée, je me suis dit que ça ne devait pas être si grave, mais on n'en a jamais discuté. Mes règles ont toujours été extrêmement douloureuses : quand j'ai mes règles je voudrais prendre un couteau et tout m'enlever. Je regrette de devoir avoir des règles chaque mois, ça ne sert à rien les règles. Je suis allée voir sur internet et certaines femmes qui ont de l'endométriose se font tout enlever, c'est cela que je voudrais, qu'on m'enlève tout puisque cela ne sert pas et ne servira jamais parce que je n'aurai pas d'enfant, je n'en veux pas. Depuis que le traitement a fait disparaître les règles, cela va déjà mieux, ça m'arrange car je ne veux pas devenir une femme, et en plus les douleurs ont diminué.

Quand j'étais au collège, à l'âge de 13 ans, j'ai subi des attouchements. C'est un plus grand qui m'a contrainte. Je voulais tellement ne pas y penser que je l'ai oublié complètement, c'est ressorti lors de mon anorexie qui a commencé il y a deux ans. J'ai honte car, comme toutes les femmes violées, on croit que c'est de notre faute, on se sent coupable. C'est la première fois que j'en parle. Quand j'y pense, cela me fait des réactions physiques, j'ai besoin de serrer mes jambes. Les grands devraient expliquer tôt aux enfants que les rapports sexuels forcés, cela n'est pas normal. Mon premier rapport sexuel, je l'ai eu à 21 ans, il n'était pas vraiment consenti, je l'ai fait à contre cœur, il a été extrêmement douloureux. Je m'en veux énormément d'avoir fait cela. Je n'ai jamais envie des rapports, je trouve cela dégoûtant, le pénis c'est moche, c'est affreux. Je pense qu'on peut très bien vivre sans rapports.

Je fais une psychothérapie depuis un an, je commence à faire la part de ce qui m'appartient et ce qui appartient à ma mère et ne me concerne pas. J'ai prévu des séances d'EMDR (Eye Movement Desensitization Reprocessing : thérapie de désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires). »

Tous les noms propres ont été anonymisés.