THÉÏA
Dossier médical
Ménopause précoce à 40 ans. Naissance de 2 garçons à 33 et 36 ans.
Sa vie.
«Je fais partie d'une fratrie de deux. J'ai un frère aîné qui a juste un an de plus que moi. Nous sommes tous les deux des accidents. Mes parents nous l'ont dit haut et fort. Ils ne se seraient pas mariés si ma mère n'avait pas été enceinte de mon frère. Mon père avait à ce moment-là une autre femme dans sa vie. Ils ont affirmé tous les deux s'être mariés sous la contrainte. Rapidement après le mariage, mon père a perdu son père, puis sa mère 6 mois plus tard. Ses 2 sœurs qui avaient 15 et 16 ans sont venues vivre chez eux. Le jour de ma naissance, mon père n'était pas là, on a dit à ma mère : 'C'est une petite fille', elle a répondu : 'Je n'en veux pas.' C'est elle qui me l'a avoué, elle n'a pas la fibre maternelle, elle ne m'a jamais donné de tendresse, jamais fait de câlins. Je n'ai pas eu de maman, je vis comme si je n'avais pas eu de mère, je me suis faite toute seule. Elle a été malheureuse toute sa vie et n'a pas eu la force de partir, ma mère était une femme soumise, je n'en veux pas de cette image de la femme.
J'ai subi très vite les violences physiques de mon père qui était un peu bourreau, qui frappait ma mère, mes tantes et moi. Je n'ai aucun souvenir d'avant mes 16 ans et demi, je les ai tous effacés, rayés de ma mémoire, c'est cela qui m'a sauvée. Ce que je n'ai pas oublié c'est le leitmotiv de mon père qui n'aimait pas les femmes, qui répétait sans cesse : 'Les femmes sont toutes des putes, des salopes, des garces.' Est marquée dans ma mémoire la dernière violence de mon père, elle est bien imprimée, je ne la lui pardonnerai jamais. Un après-midi, au lycée un cours avait été annulé, je suis allée dans un bar avec mes copines prendre une menthe à l'eau. Mon père est venu dans le bar, il m'a attrapée par les cheveux, m'a tirée dehors devant tout le monde. Il m'a fracassé la tête contre une carrosserie de voiture, il m'a cassé 4 dents qui ont dû être enlevées, personne n'a bougé pour me venir en aide. Le lendemain le directeur du lycée a fait un signalement et tout s'est enclenché. L'assistante sociale m'a aidée à demander mon émancipation et je suis partie de chez moi, je n'ai pas revu mes parents pendant 10 ans. Mon père est actuellement atteint d'une spondylarthrite ankylosante.
Je reproche à ma mère de ne pas avoir su me protéger. Aujourd'hui c'est moi qui la protège. Ma mère qui n'a pas assumé sa place de mère ne veut pas, non plus, assumer sa place de grand-mère et je ne donne jamais non plus mes enfants à garder à mon père. A 26 ans je les ai appelés pour les revoir ; je suis allée passer un mois chez eux, je ne me suis pas sentie à ma place, comme je ne me suis jamais sentie chez moi chez mes parents.
Mon mari, qui a eu une enfance aussi difficile que la mienne, a déclaré une maladie de Cröhn qui est une maladie auto-immune, un an après la naissance de notre second fils, il a été opéré 5 fois, il a un anus artificiel. Nous n'avons plus de rapports, cela me dégoûte. Quand j'ai eu 45 ans, il est parti avec ma meilleure amie, pour moi c'est un soulagement, je n'avais plus de sentiments pour lui et je n'aurais jamais pu quitter un homme malade.
Un an plus tard, j'ai commencé à souffrir du dos, des articulations, 2 ans après les douleurs ont été reconnues maladie professionnelle, avec attribution d'un handicap de 39% par la sécurité sociale, j'ai été licenciée pour inaptitude professionnelle. J'ai réussi à trouver un nouveau travail, j'ai subi des maltraitances, quatre ouvriers qui avaient bu m'ont coincée dans un hangar et l'un d'eux s'est masturbé sur moi, j'ai fait une dépression et ai de nouveau été reconnue inapte à ce travail, je suis depuis en invalidité définitive. »
Sa réflexion
« Ma ménopause précoce et mes problèmes douloureux ne sont pas un hasard, la souffrance de l'enfance est trop lourde. Je porte trop : ma mère, mes enfants, mon mari malade, le harcèlement au travail. Mon licenciement a été la goutte d'eau, mes règles se sont arrêtées juste après ; quand vous êtes licenciée après 15 ans de travail, alors que vous avez tout donné, c'est un vrai choc. Ma ménopause m'arrange, je n'ai plus besoin de ma fécondité, je n'aurai plus de risque de grossesse, je suis tranquille. C'est bien, j'ai eu 2 enfants je n'en veux plus. Je vois ma vie comme un champ de bataille, comme un défi. Je me suis faite toute seule. J'ai besoin de me sentir exister parce que je n'ai pas assez existé enfant et j'existe davantage dans les défis ».