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CONSUELO

Dossier médical

A 9 ans début de cystites qui seront à répétition, début d'algies abdomino-pelviennes non étiquetées et d'algies lombaires à répétition. A 25 ans naissance d'un garçon. A 32 ans naissance d'une fille, thyroïdite d'Hashimoto (maladie auto-immune) en post-partum. Obésité poids : 110 kg, taille : 1,66, IMC : 40, bypass à 44 ans. A 46 ans chirurgie d'un tablier abdominal, P : 55kg, IMC : 21.

Sa vie

« Je suis la dernière d'une famille de 7 enfants, je suis un accident, on me l'a toujours dit. Mes frères et sœurs ont été plus heureux. Moi je suis arrivée 5 ans après mon dernier frère, pas au bon moment et j'ai eu une enfance un peu compliquée. Mon père était chef d'entreprise, les difficultés de son travail ont commencé à peu près quand je suis née et il a fait faillite quand j'avais 3 ans, il a dû licencier son personnel. Il a commencé à boire, ma mère a fait une dépression. Mon père ne m'adressait jamais la parole, j'étais inexistante pour lui, il m'a oubliée. Jamais il ne m'a embrassée, ni prise dans ses bras, je n'ai eu ni amour ni tendresse de mon père. J'aurais voulu être un garçon pour l'intéresser car mon père préférait mon frère juste au-dessus de moi alors j'ai fait du vélo, du foot pour lui plaire. A table on n'avait pas le droit de parler, il tapait avec son mètre qui était près de lui si nous parlions. Après la faillite, on a dû aller au Secours Populaire, j'ai porté des vêtements qui avaient appartenu à des filles de mon école, j'étais Cendrillon. Ma mère a dû aller travailler, elle m'a donné de l'amour, mais pour la tendresse elle n'a pas eu le temps. J'ai eu mes premières règles à 10 ans, vers cet âge-là j'ai eu des insomnies, des cauchemars, j'étais somnambule, je me réveillais dans le lit de ma sœur.

A 18 ans je suis partie de chez moi avec un homme de 16 ans mon aîné, je cherchais un papa. J'ai vécu 2 ans avec lui malgré ses violences verbales et physiques, il m'a cassé le nez, fracturé un pied. Pendant ces 2 ans j'ai fait une cystite par mois. J'ai réussi à le quitter et suis revenue chez mes parents. A 22 ans, j'ai rencontré mon mari. J'ai eu mon fils aîné à 25 ans et seulement à ce moment-là mon père s'est mis à me parler comme à une personne, avant je n'existais pas. Je l'ai senti fier de moi pour la première fois. Mon père qui a 87 ans est maintenant dans une maison de retraite, il a une cirrhose et une maladie d'Alzheimer. Je voudrais maintenant lui demander pourquoi je ne l'ai pas intéressé quand j'étais petite, avant je n'arrivais pas à en parler, c'était trop dur. Mais maintenant à cause de sa maladie d'Alzheimer, je ne le pourrai plus. Sept ans après le premier, j'ai eu mon deuxième enfant, j'ai pris 20 kg pendant ma grossesse que je n'ai pas perdus après, j'ai même continué à en prendre et juste après la naissance j'ai déclaré ma thyroïdite d'Hashimoto.

Il y a quelque chose .... mais je ne peux pas en parler...J'avais à peu près 9 ans, cela a duré 2 ans, il était un proche, il était de ma famille, et il m'a ..... J'en ai parlé à ma mère, elle ne m'a pas crue, je me suis donc tue (pleurs). Je n'en ai plus jamais parlé, sauf à ma sœur quand j'ai eu 20 ans, puis à vous aujourd'hui, soit 39 ans après les faits. Mon mari ne le sait pas, je ne peux pas le dire, j'ai tellement peur qu'en parler remue le passé. J'ai commencé mes cystites à ce moment-là, et les douleurs abdominales et lombaires aussi. Je me souviens que si je me plaignais, je me faisais gronder car il n'y avait pas d'explications pour ces douleurs, ma mère disait que je simulais. J'ai parfois eu peur d'être enceinte puisque j'ai été réglée à 10 ans. »

Sa réflexion

« Cette période entre 9 et 11 ans a été la plus difficile de ma vie. Je l'ai occultée pendant des années, je n'y pensais pas, mais depuis plusieurs années, cela remonte et j'y pense souvent... très souvent.... sans arrêt (pleurs). J'ai des insomnies, des cauchemars qui parlent de cela comme quand j'étais enfant. Le sentiment le plus difficile pour moi est la culpabilité, car, quand c'est arrivé, je me suis dit que c'était de ma faute. J'ai aussi la culpabilité de ne pas avoir su me faire aimer par mon père quand j'étais enfant.

Mon poids était une carapace, une protection contre le monde, je me cachais. Depuis que j'ai perdu du poids, le regard des hommes sur moi a changé et je comprends qu'effectivement mon surpoids me protégeait car je n'étais pas attirante. Depuis la chirurgie, je ne suis pas la même dans mon corps, j'ai l'impression qu'il y a un décalage entre mon corps et ma tête. Mon passé remonte davantage encore et je me sens en difficulté, j'ai perdu du poids, mais depuis j'ai mal partout et les médecins ont posé le diagnostic de fibromyalgie. La psychiatre que j'ai vue avant l'intervention m'a demandé quelles étaient les raisons de mon choix pour la chirurgie, si j'étais prête ; c'est tout, elle n'a pas posé de questions sur les raisons de ce surpoids, sur ma vie.»

Tous les noms propres ont été anonymisés.