🏠 Mon Corps Raconte Mon Histoire

JULIANE

Dossier médical

A 25 ans naissance d'un garçon par césarienne en urgence pour toxémie, insomnies pendant la grossesse. Naissance d'un second garçon à 29 ans. Endométriose diagnostiquée par cœlioscopie à 28 ans, motivant une nouvelle cœlioscopie à 30 ans.

Sa vie

« Je suis l'aînée d'une fratrie de 2 filles, ma sœur a 2 ans de moins que moi. J'ai eu une enfance douloureuse, il n'y avait pas de place pour nous les enfants, les parents étaient trop occupés sauf pendant leurs vacances. J'ai eu une relation très conflictuelle avec ma sœur, nous étions les opposés. On n'a jamais rien partagé, la mésentente, les jalousies, les cris, les pleurs, les conflits étaient quotidiens, ce qui était difficile pour nous et pour les parents. J'ai ressenti qu'ils se sont investis pour ma sœur et ses activités, je ne me suis pas sentie reconnue, ils ont fermé les oreilles à mes demandes. Quand j'avais 6 ans, ma mère a eu un accident de voiture et est restée un an à l'hôpital, ce sont les grands-parents qui sont venus nous garder.

Les parents avaient eux-mêmes des problèmes. Mon père était toujours malade, il a eu des tas d'allergies, de l'asthme, des douleurs articulaires, il a été opéré plusieurs fois des articulations, il a fait une fibromyalgie qui s'est déclarée après le décès de son père, décès qu'il n'a pas supporté. Il était très investi dans sa maladie et il oubliait les autres, il était toujours dans la plainte. Ma mère je l'ai toujours connue dépressive. J'ai mal vécu mon adolescence car j'ai voulu que nous fassions une thérapie familiale et mes parents ont refusé. En fait on n'arrivait pas à vivre ensemble tous les 4, il n'y a jamais eu l'alchimie d'une famille. C'est pour cela que je suis partie à 18 ans. J'ai camouflé mon départ avec le prétexte de mes études, mais en fait j'ai raté volontairement tous les concours près de mon lieu de vie pour m'éloigner. Je connais mon futur mari depuis l'âge de 16 ans mais j'ai préféré m'éloigner de lui plutôt que de rester auprès de mes parents. Depuis que je suis adulte, mes parents sont davantage présents. En fait ils étaient faits pour avoir des enfants adultes.

Ma première grossesse s'est mal passée elle m'a ramenée à des choses de mon enfance. A partir du sixième mois j'ai été très angoissée, une angoisse à 10/10 et une peur à la même hauteur, une peur viscérale, incontrôlable, irrationnelle, une peur qui m'empêchait de bien vivre ma grossesse, qui modifiait mon comportement. Cette peur m'empêchait de dormir, j'étais réveillée 2 ou 3 fois par nuit par des cauchemars : toujours le même : la mort de mon bébé ou la mienne. Je ne comprenais pas pourquoi j'avais cette peur de la mort, ce dernier trimestre a été pour moi catastrophique. C'est à ce moment que ma tension est montée, que j'ai pris 20 kg et que j'ai dû être césarisée à 38 semaines. »

Sa réflexion

« Depuis peu j'ai appris un secret, que ma mère aussi d'ailleurs ignorait et j'ai compris pourquoi elle a toujours été dépressive. Ma grand-mère maternelle a eu 2 filles, puis elle a été enceinte d'un garçon qui est mort au sixième mois de la grossesse. Deux ans plus tard ma mère est née, sans prénom choisi lors de sa naissance. Mes grands-parents ne se sont pas du tout investis pour cette petite fille, ma grand-mère disait que ma mère était une enfant très sage qui ne disait jamais rien. En fait elle n'avait pas le droit d'exister et elle ne se donne toujours pas le droit d'exister, elle a fait une tentative de suicide.

J'ai compris une chose qui me paraît claire maintenant : le pourquoi de ces angoisses de mort apparues au sixième mois de ma première grossesse. Elles étaient une mémoire du secret de ma grand-mère, de la perte de son petit garçon à 6 mois de grossesse. J'étais sa première petite fille à mettre au monde un garçon. Je n'ai pas du tout eu ces angoisses lors de ma seconde grossesse qui s'est très bien passée.

Mon endométriose a certainement un lien avec mon enfance douloureuse. Ces douleurs mettent en lumière des problèmes émotionnels non résolus. Ce qui me bloque c'est l'incompréhension de mes parents envers leurs enfants. Je n'ai pas fait le deuil de mon enfance que je n'ai pas eue comme je la voulais. Je leur en ai voulu, je leur en veux encore d'avoir refusé cette thérapie familiale. J'ai de la colère contre ma mère et sa tentative de suicide qui me dit que je n'ai pas assez d'importance pour elle, pour la rattacher à la vie. Je le ressens comme quand dans mon enfance je ne me sentais pas exister à ses yeux d'un point de vue émotionnel, alors que rationnellement je savais que si.

Cela m'a soulagée de pouvoir me livrer, parler de ma maladie, je vais réfléchir à certaines choses de mon enfance dont je dois me libérer. »

Tous les noms propres ont été anonymisés.